Réhabilitation de la sorcière, médecin du peuple

Réhabilitation de la sorcière, médecin du peuple


 Je viens de terminer le livre de Jules Michelet La sorcière paru aux éditions Vega.


Ce livre datant, pour sa toute première édition, de 1862, vient d'être réédité avec une préface et des commentaires de Jean-Philippe de Tonnac et des illustrations de Gabriel Sanchez.


Jules Michelet était historien,  enseignant au Collègue de France, avant d'en être chassé et faisait partie des écrivains progressistes français.

Jean-Philippe de Tonnac est un écrivain, essayiste français.


Cet essai historique est le troisième volet d'une trilogie de Jules Michelet consacrée à la femme.

Accusé à l'époque d'être une apologie du satanisme, ce texte, aux accents poétique, est un écrit féministe. L'auteur s'intéresse à la femme et à son triste sort au moyen âge. Il met en avant sa féminité, son humanité et son innocence. Il rend hommage également à son insoumission. 

 Mais c'est aussi un réquisitoire anticlérical dans lequel il réhabilite la sorcière, guérisseuse des pauvres, femme insoumise qui se révolte à sa manière contre les oppressions du Moyen-Age et la cruauté des seigneurs dans un monde rempli de peurs et de colères.

Dans cet ouvrage, après une première partie est plus philosophique, la deuxième partie est plus historique. Il nous y relate notamment différents grands procès en sorcellerie. Dans l'épilogue, il revient sur les dons de guérisseuses des pauvres, des sorcières, vite oubliés à l'époque.  


Voici un extrait :

"Dur est l'hiver, long et triste dans le sombre nord-ouest. Fini même, il a des reprises, comme une douleur assoupie, qui revient, sévit par moments. Un matin, tout se réveille paré d'aiguilles brillantes. Dans cette splendeur ironique, cruelle, où la vie frissonne, tout le monde végétal paraît minéralisé, perd sa douce variété, se roidit en âpres cristaux.

La pauvre sybille, engourdie à son morne foyer de feuilles, battue de la bise cuisante, sent au coeur la verge sévère. Elle sent son isolement. Mais cela même la relève. L'orgueil revient, et avec lui une force qui lui chauffe le coeur, lui illumine l'esprit. Tendue, vive et acérée, sa vue devient aussi perçante que ces aiguilles, et le monde, ce monde cruel dont elle souffre, lui est transparent comme verre. Et alors, elle en jouit, comme d'une conquête à elle.

N'en est-elle pas la reine ? n'a-t-elle pas des courtisans ! Les corbeaux manifestement sont en rapports avec elle. En troupe honorable, grave, ils viennent, comme anciens augures, lui parler des choses du temps. Les loups passent timidement, saluent d'un regard oblique. L'ours (moins rare alors) parfois s'assoit gauchement, avec sa lourde bonhomie, au seuil de l'antre, comme un ermite qui fait visite à un ermite, ainsi qu'on le voit si souvent dans les Vies des pères du désert.

Tous, oiseaux et animaux que l'homme ne connaît guère que par la chasse et la mort, ils sont des proscrits comme elle. Ils s'entendent avec elle. Satan est le grand proscrit et il donne aux siens la joie des libertés de la nature, la joie sauvage d'être un monde qui se suffit à lui-même." 


Un livre ancien aux accents de modernité, à lire ou à relire.


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